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Côte d’Ivoire : Or donc Alassane Ouattara n’a pas réussi là où Venance Konan dit que les autres ont échoué

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Côte d’Ivoire : Or donc Alassane Ouattara n’a pas réussi là où Venance Konan dit que les autres ont échoué

Le Directeur général du groupe ‘’Fraternité Matin’’, Venance Konan, reconnait, dans cet éditorial, que Alassane Ouattara qui se proclame le plus ‘’digne’’ fils d’Houphouët-Boigny n’a rien fait pour honorer la mémoire du premier président de la République de Côte d’Ivoire.

QU’HOUPHOUËT-BOIGNY NOUS PARDONNE-Quelle histoire ! Il y a à se demander ce que Houphouët-Boigny avait mis dans son fauteuil, celui du pouvoir, avant de nous quitter. Voyez vous-même. Celui qui lui a succédé a dû quitter le pouvoir à la suite d’un coup d’Etat. L’auteur de ce coup d’Etat a dû à son tour fuir devant la colère d’une foule de manifestants.

Le troisième à lui succéder a lui aussi quitté le pouvoir contre son gré, dans le fracas des bombes. Le quatrième à s’asseoir dans son fauteuil avait bien voulu partir au terme de deux mandats. Il l’a annoncé à la nation toute entière.

Mais voici que des évènements totalement imprévus font que pour la première fois en Afrique, un président qui a décidé de quitter le pouvoir risque d’être contraint d’y rester. Une partie de son peuple le supplie de rester encore, pendant qu’une autre s’y oppose. Personne ne sait comment la situation évoluera, d’autant plus que l’intéressé lui-même ne s’est pas encore prononcé, et que tout dépendra de ce qu’il décidera.

A l’analyse de tout cela, ma conviction est que Houphouët-Boigny est fâché contre nous. Je m’explique, tout en sachant que tout cela relève de l’irrationnel, mais je l’assume.

Il y a quelques années, le maire de Cocody avait érigé une grande statue de Saint Jean à un carrefour de sa commune, pour demander sa protection. Ils sont nombreux, les chrétiens qui ont à leur domicile une statue de Marie, la mère de Jésus, devant laquelle ils se prosternent régulièrement pour demander protection et faveurs. Et dans toutes leurs prières, ils demandent également les faveurs des autres saints qui se trouveraient au paradis.

Cela veut dire qu’ils ont la conviction que les âmes de ces personnes que l’on appelle des saints se trouvent dans un endroit, d’où elles peuvent interférer dans la vie ici-bas. On peut donc croire que l’âme d’Houphouët-Boigny se trouve aussi quelque part d’où il peu interférer dans nos vies. Est-il dans le même endroit que les saints chrétiens ? Pourquoi pas, lui qui bâtit la plus grande basilique chrétienne du monde avant de s’en aller.

Mais une chose certaine est qu’aucun de ces saints que les chrétiens ivoiriens prient, dont très peu sont africains, ne connaissait la Côte d’Ivoire qui n’existait d’ailleurs pas, de leur vivant. Honnêtement, entre ces saints et Houphouët-Boigny qui a façonné ce pays et lui a donné les bases sur lesquelles il repose aujourd’hui, 27 ans après sa mort, qui est le plus susceptible de s’intéresser au sort de la Côte d’Ivoire et d’interférer pour elle ? 

Pour moi c’est Houphouët-Boigny. Mais il a toutes les raisons d’être fâché. Nous, Africains, que nous soyons chrétiens ou musulmans, les deux « vraies religions » à nos yeux, nous croyons tous néanmoins que nos morts sont juste à côté, dans un autre monde, mais à côté de nous, et peuvent agir sur nos vies. Faisons donc l’effort de croire qu’Houphouët-Boigny aussi est à côté et nous regarde, comme les ancêtres des Européens et des Juifs que l’on appelle les saints.

Qu’avons-nous fait de son héritage ? D’abord son héritage matériel. Son premier successeur, Henri Konan Bédié, a détruit la maison où il avait vécu, pour la transformer à son goût, afin de s’y installer. Comme s’il n’y avait pas d’autre endroit dans la ville d’Abidjan où il pouvait vivre. Est-ce un hasard s’il n’a passé qu’une seule nuit dans cette maison, la dernière de son règne ? Robert Guéï est arrivé au pouvoir par les armes. Ce que Houphouët-Boigny abhorrait. C’est une foule aux mains nues qui l’a chassé du pouvoir.

Laurent Gbagbo, adversaire de toujours d’Houphouët-Boigny, lui non plus, n’a pas trouvé d’autre endroit pour vivre que dans la maison d’Houphouët-Boigny. Il y a été bombardé. La première résidence d’Houphouët-Boigny, celle où avaient vécu Bédié et Affi Nguessan, avait été abandonnée à des squatters qui l’avaient saccagée. C’est seulement maintenant que cette résidence est en train d’être réhabilitée. Celle de Yamoussoukro est pratiquement abandonnée. Personne n’a pu en faire un musée, ou un palais présidentiel comme il en rêvait. Tout le monde a promis de transférer effectivement la capitale à Yamoussoukro, mais personne ne l’a fait. Alassane Ouattara avait promis de s’installer à Yamoussoukro, il ne l’a pas fait.

Personne n’a pu ériger à Houphouët-Boigny un monument digne de lui, lui, le premier président de ce pays, lui dont tout le monde se réclame, lui qui a rayonné dans toute l’Afrique et dans le monde, pas un musée ou un mausolée comme son adversaire Nkrumah, qui avait pourtant été renversé par un coup d’Etat, en a eu dans son pays, pour que toutes les générations à venir se souviennent de lui. Un tel monument aurait-il ruiné la Côte d’Ivoire ? Nous n’avons même pas été fichus de planter un panneau à l’entrée de Yamoussoukro ou sur sa résidence pour indiquer qu’il s’agit du village du premier président de notre pays, et de l’endroit où il vécut et est enterré. Qu’est-ce que cet homme nous a fait pour que nous le traitions ainsi ? Pourquoi voulons-nous que son âme soit contente de nous ?

Qu’avons-nous fait de son héritage politique ? Vers la fin de sa vie, Houphouët-Boigny avait fait de la paix sa seconde religion. Il a construit à Yamoussoukro la plus grande basilique du monde baptisée Notre Dame de la Paix, une fondation pour la recherche de la paix, et il a créé un prix logé à l’UNESCO pour récompenser ceux qui œuvrent dans le monde pour la paix.

Qu’avons-nous fait après lui ? Nous avons d’abord divisé le pays entre un nord et un sud à qui nous avons inculqué la haine de l’autre et nous avons tout mis en œuvre pour qu’il y ait la guerre chez nous. Et elle est arrivée dans le pays d’Houphouët-Boigny. Nous chantons tous qu’en son temps il y avait un vrai « vivre ensemble ».

Est-ce encore le cas aujourd’hui ? Nous sommes tous devenus tribalistes et certains n’hésitent pas à proclamer avec fierté leur xénophobie. Pourquoi voulons-nous qu’il soit content de nous ?

Nous avons moins de trois mois pour aller demander pardon à Houphouët-Boigny. Allons-y dès maintenant ! Sinon je crains fort que toute cette histoire ne se termine mal, surtout si nous devons revivre un remake de l’élection de 2010.

Venance Konan


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