Entretien avec Assoa Adou, Secrétaire général du FPI: «Non, non… Nous n’avons pas changé d’avis»
Récemment invité de RFI, Assoa Adou, Secrétaire général du Front populaire Ivoirien (FPI) a appelé à la libération d’Affi N’guessan Pascal et tous les autres prisonniers politiques. Il s’est également prononcé sur le cas de son mentor Laurent Gbagbo.
Les élections législatives sont prévues dans les trois mois à venir. Quelle sera l’attitude du Front populaire ivoirien par rapport à ce scrutin ?
Notre Comité central, qui s’est réuni hier, a décidé d’aller aux élections législatives, avec l’accord du président Laurent Gbagbo, qui nous encourage et demande à tous ses militants et militantes de se mobiliser pour que l’on ait beaucoup d’élus.
Vous nous disiez, avant la présidentielle, « la Commission électorale n’est pas neutre ». Est-ce qu’aujourd’hui vous avez changé d’avis ?
Non, non… Nous n’avons pas changé d’avis. La Commission est toujours ce qu’elle est. Le Conseil constitutionnel est également dans une position de non-respect de la Constitution, mais en politique il faut toujours se battre.
Est-ce qu’avant ces législatives, vous espérez une réforme au niveau du Conseil constitutionnel ?
Nous demandons, en accord avec nos partenaires de l’opposition, c’est à dire le PDCI-RDA et toutes les autres plateformes de l’opposition, que cette Commission soit réformée. Il y a eu une réunion lundi avec monsieur le Premier ministre et hier avec le ministre de l’Intérieur. Mais nous constatons déjà qu’ils ne veulent pas aller dans le sens d’une vraie réforme.
Et justement, si vous n’obtenez pas ce que vous demandez, vous irez quand même aux législatives ?
Nous irons aux législatives, en prenant toutes les dispositions nécessaires, pour que notre victoire ne nous soit pas volée.
Vous dites que cette décision a été prise en accord avec Laurent Gbagbo, qui vit toujours à Bruxelles, en Europe. Est-ce qu’un début de dialogue est mis en place entre votre parti et le pouvoir ?
Ce que le pouvoir est en train de faire, ce n’est pas ce que Laurent Gbagbo a demandé. L’opposition et Laurent Gbagbo ont demandé que les forces vives de la nation ivoirienne se retrouvent autour d’une table, pour redéfinir les nouvelles règles du jeu et c’est ce que monsieur Ouattara et ses partisans refusent. Nous avons un slogan qui dit « Asseyons-nous et discutons ». Eux, ils ont un slogan qui est tout à fait le contraire, qui dit « Nous allons les broyer », c’est-à-dire, nous allons les tuer.
Mais tout de même, le mois dernier, suite à la demande insistante de l’ancien chef de l’État, les autorités ivoiriennes ont fini par délivrer deux passeports à Laurent Gbagbo.
C’est vrai, ils les ont délivrés, mais ils devraient même les donner à Laurent Gbagbo, sans qu’il les ait demandés.
Mais n’est-ce pas la preuve qu’il y a un début de dialogue entre vous ?
C’est que l’on croyait, mais on voit que c’est un jeu qu’ils sont en train de faire. Ils ne vont pas aller dans le sens de la décrispation, parce qu’on peut vous donner le passeport et puis ont dit : « On n’est pas prêts, attendez… »
Alors justement, à quelle date espérez-vous un retour de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire ? Il voulait rentrer avant la fin de cette année.
Mais si cela ne tenait qu’à moi seul, je vous dirais même que la semaine prochaine, Laurent Gbagbo doit être ici. Alors s’il n’arrive pas maintenant, comme il l’a souhaité lui-même, nous allons demander à ses militants, à ses sympathisants de se mobiliser pour réclamer son retour.
Donc vous n’écartez pas la mobilisation de vos militants pour cela ?
Mais nous allons le faire. Nous allons mobiliser nos militants.
En Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo est sous le coup d’une condamnation à vingt ans de prison pour le pillage de la BCEAO. Est-ce que cela ne complique pas son retour ?
Ici, en Côte d’Ivoire, on sait qui a pillé. Ce n’est pas Laurent Gbagbo.
Donc vous espérez une mesure d’amnistie ou de grâce de ce point de vue, non ?
Mais c’est tellement simple ! Monsieur Ouattara était poursuivi par le président Bédié. Il avait contre lui un mandat d’arrêt international. Laurent Gbagbo, quand il est arrivé au pouvoir, a pris une loi d’amnistie pour admettre monsieur Ouattara en Côte d’Ivoire, pour qu’il puisse participer à la vie politique nationale. Nous pensons qu’aujourd’hui, Laurent Gbagbo mérite tout cela aussi.
Si Laurent Gbagbo ne peut pas rentrer avant les législatives, est-ce que vous irez quand même à ces élections ?
D’abord, je n’y pense même pas, parce qu’il va rentrer. Pour moi, ce n’est pas une hypothèse. Il va rentrer.
Et vous pensez justement qu’en annonçant aujourd’hui que vous allez à ces élections, cela va faciliter les négociations pour son retour, peut-être ?
Normalement, oui. Quand vous avez une opposition qui accepte de compétir pacifiquement aux élections, vous devez applaudir dans cette Afrique, où partout il y a des conflits.
Et Laurent Gbagbo pourrait-il être candidat à la députation ?
Cela ne dépend que de lui.
Mais quel est votre point de vue ? Vous lui conseillez d’être candidat ou pas?
S’il veut être candidat, nous allons nous mobiliser pour lui dans la circonscription qu’il va choisir.
Et vous n’excluez pas que Laurent Gbagbo soit candidat à la prochaine élection présidentielle ?
(Rires) On n’en est pas encore là. Mais si cela arrive, je pense que ses partisans sont là pour donner leur avis.
Assoa Adou, pour ces législatives, vous appelez à un grand rassemblement de tous les partis de l’opposition, y compris vos frères ennemis du FPI de Pascal Affi Nguessan, du FPI légal ?
On n’a pas de frères ennemis. Nous sommes divergents sur nos objectifs politiques, mais nous ne sommes pas des ennemis. La prison de la MACA que je connais malheureusement bien, parce que j’y ai passé quatre années, est surpeuplée. Les gens dorment à tour de rôle !
Et aujourd’hui, que demandez-vous pour votre ancien camarade Affi Nguessan ?
Mais qu’on le libère ! Qu’on libère Affi et tous les autres prisonniers politiques, civils et militaires, et que tous les exilés rentrent au pays.
Nathanaël Yao
Avec Akody.com
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