Législatives du 06 mars 2021 à Songon: N’koumo Mobio Eric crache ses vérités
Candidat du Pdci-Rda et de l’opposition dans la circonscription de Songon, le maire N’koumo Mobio Eric part avec les faveurs des pronostics à ce scrutin. Selon lui, la sous-préfecture de Songon demeure un bastion imprenable du Pdci-Rda. N’Koumo Mobio Eric soutient, par ailleurs, que les législatives du 6 mars prochain ont un enjeu national qui se décline en trois phases à savoir, l’enjeu politique, l’enjeu institutionnel et le développement local. Entretien.
Vous avez été choisi pour défendre les couleurs du Pdci-Rda dans la circonscription de Songon. Comment réagissez-vous après cette confiance à vous faite par la Direction du Pdci-Rda ?
Je voudrais, d’entrée de propos, remercier le président Henri Konan Bédié et avec lui le vice-président Emile Constant Bombet qui a présidé le Comité électoral, pour le choix qu’ils ont pu faire sur ma personne, en suivant les recommandations des militants de base. C’est un grand honneur, c’est un combat et il faut que nous l’assumions pour le parti.
La bataille s’annonce rude du fait des enjeux. Est-ce que vous êtes animé de sérénité avant ce combat ?
Effectivement, la bataille est rude parce que toute élection est rude. Moi, je ne vois pas l’adversaire mais je vois plutôt le fait que nous sommes dans une élection dont l’issue n’est pas connue d’avance. En ce sens, c’est une bataille qui est difficile. Cependant, il faut dire que Songon est une circonscription qui a toujours voté le Pdci-Rda. Nous avons l’avantage, cette année, d’être associé à Eds, c’est-à-dire aux militants de la plateforme Ensemble pour la Démocratie et la Souveraineté qui constitue la deuxième force politique à Songon après le Pdci-Rda. Donc deux partis politiques majeurs qui, localement, s’unissent, il y a plus de raison d’être serein que d’être inquiet. Ceci dit, nous sommes quand même dans une élection, donc il faut en tenir compte.
Quels sont les atouts du candidat N’Koumo Mobio, aujourd’hui, sur le terrain à Songon ?
Je suis à Songon depuis les années 1995 quand je suis rentré après mes études. J’ai donc milité dans toutes les structures socio culturelles de la commune. Donc, je peux dire que je suis connu des populations. J’exerce un mandat municipal depuis 2001 et je suis Maire de Songon depuis 2013, c’est-à-dire depuis 8 ans. J’ai été réélu en 2018, donc je jouis d’une réputation, une notoriété spontanée que peut-être beaucoup de personnes n’ont pas. Ensuite, je suis adossé à deux partis politiques très structurés présents sur l’ensemble de la sous-préfecture de Songon. Donc, il n’y a pas de raison qu’en mettant tout le monde en marche de façon cohérente et structurée, nous ne remportions pas cette élection.
Vous avez indiqué que Songon a toujours voté pour le Pdci-Rda. Est-ce que ce vivier existe encore et a été entretenu après tout ce nous avons connu depuis 2018 ?
Oui tout à fait. Je suis par ailleurs délégué départemental du Pdci-Rda de Songon. Et je peux assurer que nos bases n’ont pas bougé lorsqu’il y a eu la crise avec le Rhdp. Sur les 29 sections que nous avons, seuls les titulaires de trois sections ont basculé et avec quelques comités de base. Mais qui ont été vite remplacés. Globalement, le personnel politique est resté en place. Les doyens qui sont l’âme et l’histoire de notre parti à Songon sont restés en place et le parti a continué de vivre et à être animé. Donc ceci pour dire qu’il n’y a pas eu de tremblement de terre chez nous à Songon.
N’avez-vous pas des soucis par rapport à l’environnement de ces législatives eu égard à ce que nous avons connu au mois d’octobre dernier ? Est-ce que l’environnement vous rassure ?
Nous avons eu malheureusement à Songon une attaque de jeunes gens, activés ou mobilisés par je ne sais qui. Nous avons identifié, dans le village de Songon M’Bratté, une maison qui a hébergé pendant de longs mois une quarantaine de jeunes gens qui s’entraînaient sous prétexte qu’ils étaient mis en mission. Et qui, certainement, ont été les personnes qui ont été convoyées sur le terrain lors de la désobéissance civile pour attaquer les populations. Il y a une crainte légitime que nous devons avoir. Nous avons attiré l’attention de l’administration territoriale présente chez nous, donc la Sous-préfecture aussi bien que les forces de sécurité et la gendarmerie. Je pense qu’elles ont pris des mesures pour éviter les débordements inutiles lors de ces consultations électorales.
Dans la circonscription de Songon, il y a un candidat du Rhdp qui semble se faire entendre. N’avez-vous pas des craintes face à ce candidat qui occupe déjà un certain niveau dans l’administration territoriale ?
Le Rhdp a exercé le pouvoir de 2010 à 2020. En tant que parti implanté sur l’échiquier national, le Rhdp est une force politique à prendre au sérieux. Il est d’autant plus à prendre au sérieux qu’il est localement représenté au niveau de Songon par une personnalité qui a un rôle et une stature de niveau national. Ce qu’il faut savoir, c’est que c’est une élection. Ça aurait été même un personnage lambda, cela allait poser des problèmes. Et quand en plus c’est quelqu’un qui a un rôle national et une stature nationale, c’est forcément un souci majeur qu’il faut intégrer. Mais il est important de préciser que le Rhdp, sur l’ensemble des consultations électorales qui se sont déroulées à Songon depuis 1990, n’a guère évolué. Donc si nous prenons en compte le fait que le Fpi version Gbagbo est resté en place et le Pdci a perdu quelques plumes mais pas les plus grosses, on peut dire sur le papier que le nombre est favorable au Pdci-Rda et à la liste que je conduis. Ceci dit, les élections locales ont des équations dont on peut avoir la solution sur le papier, mais qui peuvent avoir des implications différentes sur le terrain par autre chose que ce que ça semble donner sur papier. Donc tout le rôle de la campagne sera de faire en sorte que cette majorité sociologique acquise sur le papier puisse se transformer en des voix tangibles au soir du 6 mars. Ce qui est sûr, c’est que lors des élections présidentielles, le candidat aux législatives pour le Rhdp a été le directeur local de campagne du Rhdp à la présidentielle. Et il a fait campagne sur l’étendue du territoire de cette commune. En retour et malgré ce que les chiffres peuvent annoncer, il y a eu moins de 10% de taux de participation. Donc on peut imaginer que si on arrive à montrer aux populations que ce scrutin est fondamentalement un scrutin à enjeu national, les profils personnels des candidats ne pèseront pas beaucoup dans le choix des électeurs. L’enjeu des élections législatives, c’est un enjeu national parce que c’est un remake, à notre avis, de l’élection présidentielle ratée d’octobre 2020. Et nous pensons que les populations sauront être logiques avec elles-mêmes pour reconduire, cette fois-ci, non pas en s’abstenant mais en exprimant massivement leurs suffrages afin qu’on ne détourne pas leurs voix au soir du 6 mars.
Selon vous, quel est l’enjeu principal de ces élections législatives ?
Je pense qu’il y a trois lectures à faire. La première est politique. Si on veut donner une forme de légitimité à nos deux présidents, les présidents Bédié et Gbagbo qui vont engager certainement des discussions avec le président Alassane Ouattara, si nous voulons qu’ils s’adossent sur une légitimité, il faut que les électeurs proches de ces partis leur donnent le maximum d’élus à ces élections. Cela permettra à nos présidents de discuter au bénéfice des populations pour définir le schéma institutionnel approprié permettant de respecter la volonté populaire manifestée en octobre 2020 et qui aura été confirmée en mars 2021. La deuxième lecture est peut-être au niveau institutionnel. Aujourd’hui, le pouvoir exécutif a caporalisé le pouvoir judiciaire et une partie du pouvoir législatif car au Sénat, un tiers des sénateurs est nommé. Donc l’Assemblée nationale est encore la seule Chambre qui, à l’occasion de cette élection, va être renouvelée. Il faut, pour l’équilibre et la santé de notre démocratie, faire en sorte que nous envoyions une majorité d’opposants pour équilibrer les pouvoirs et espérer revenir à une situation institutionnelle normale telle que prévue par notre Constitution. Le troisième enjeu est la possibilité qui est offerte à cette Assemblée nouvelle de modifier les lois sur le découpage administratif de notre pays et la politique de décentralisation, afin que les centres de décisions qui impactent le développement local soient portés au plus près des populations et placés sous leur contrôle. Entre la décentralisation voulue par le président Félix Houphouët-Boigny en 1980 et celle que l’on vit aujourd’hui après plus de 20 ans, c’est le jour et la nuit. Là où l’on a voulu accorder un vrai pouvoir de décentralisation pour permettre aux populations de ne plus dépendre du central et de régler les problèmes de développement local en local avec des gens qu’elles ont élus, aujourd’hui, carrément, tout a été recentralisé. Les recettes fiscales des collectivités sont centralisées, la trésorerie est centralisée, la loi qu’on vient de voter sur le régime domanial et financier des collectivités va nous imposer bientôt des contrôleurs nommés par le ministre du Budget. Bref, l’on a enlevé tous les moyens à l’élu local alors que c’est par l’élu local que le développement se fait. Donc ce n’est pas étonnant qu’aujourd’hui, l’argent travaille tellement qu’il n’arrive plus dans les poches des populations. Donc si nous voulons modifier la trajectoire économique et la politique qui est menée, c’est d’envoyer à l’Assemblée nationale des députés qui vont modifier toutes les lois qui impactent le découpage administratif et électoral ainsi que la décentralisation qui est en œuvre. A cause de ces trois enjeux, je pense que ces législatives sont des élections à enjeu national parce que les lois que nous allons voter, les Institutions qui vont être réformées, ont un caractère national et non pas local. Si on veut faire un enjeu de développement local, alors, que ces candidats attendent les élections municipales ou régionales pour se signaler. L’élection législative, à mon avis, a un enjeu national de sorte que le profil personnel des candidats doit être mis en sourdine afin de considérer plutôt l’impact sur l’état de la nation, des réformes portées par les partis politiques qui les soutiennent.
Comment voyez-vous cette prochaine législature eu égard à la nouvelle configuration politique qui se présente en Côte d’Ivoire ?
Je pense que si les différents candidats prennent le temps de bien expliquer les enjeux, il n’y a pas de raison que le peuple de Côte d’Ivoire dont la souveraineté est en train de lui échapper, ne fasse pas un sursaut pour envoyer à l’Assemblée nationale une majorité de députés de l’opposition, la seule Institution encore capable de tenir tête à l’Etat, à l’Exécutif dont l’emprise s’étend sur les autres pouvoirs. En le faisant, la future Assemblée nationale va refléter l’état d’esprit du pays. Petit à petit, on va remettre les Institutions en place et redonner le pouvoir au peuple.
Votre message à l’endroit des populations de Songon?
Je voudrais dire aux populations de Songon que notre candidature présente une option différente de celle proposée par les candidats du Rhdp. Cette élection ne doit pas donner lieu à des insultes, menaces ou violences. Ce n’est pas non plus un affront fait aux aînés. Mais plutôt, c’est l’occasion d’un débat d’idées entre citoyens également préoccupés par le devenir de leur pays. Et le combat de notre génération est un combat pour l’avenir, est une quête d’une indépendance nouvelle. Houphouët-Boigny a eu l’indépendance politique, administrative avec les colons. Nous, nous devons gagner l’indépendance de la souveraineté face à un peuple qui est opprimé dont l’oppresseur est national. C’est en cela que les frontières de ce combat ne sont pas les mêmes que celles que Houphouët-Boigny a connues. C’est un combat dont les frontières sont internes. Donc il faut que notre génération se montre digne de ce combat et aille conquérir notre nouvelle indépendance.
Interview réalisée par PAUL KOFFI et JEROME N’DRI
In le nouveau réveil / Mercredi 03 février 2021 – N°5678 // www.lereveil.net
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