Chronique sur l’école ivoirienne: Premier de justesse devant le dernier de la classe

Ce n’est pas encore la fin de l’année scolaire chez nous au pays, mais déjà, on apprend que notre système éducatif qui a été pensé dans les années 1960 par Félix Houphouët-Boigny, ne répond plus aux multiples promesses épargnées en lui. En années de travail méthodique et en années de patience ! Depuis des lustres, les vacances scolaires interviennent pour ceux des élèves qui n’ont pas d’examens de fin d’année à passer, en fin mai. Il se trouve que le département en charge de l’évaluation des systèmes éducatifs publics de l’espace francophone africain a fait l’objet de classement par cette instance internationale.
Notre beau pays qui a raté de justesse d’accomplir son projet d’émergence à l’horizon 2020, n’a pas réussi à sauver les meubles de notre système éducatif public avec un rang honorable. Un rang digne des grands défenseurs de l’école ivoirienne. Le genre de rang élitiste auquel le père de la nation a abonné tous les secteurs essentiels de la vie du pays au lendemain de notre indépendance d’avec la tutelle française. Sur un effectif de quatorze pays dont les systèmes ont été passés au peigne fin par une communauté de spécialités aguerris à comparer entre-elles le niveau des systèmes éducatifs, aux fins d’isoler la valeur réelle de chacun d’eux, notre beau et valeureux pays dont le nombre de classes est tant vanté, a pris sans surprise aucune, la repoussante et inconfortable place d’avant-dernier.
Autant dire celle de dernier pour qui connait les sacrifices immenses qui ont été consentis dans ce domaine crucial qu’est l’éducation. Houphouët, pour des raisons évidentes, en avait fait une affaire personnelle. Dès 1960, convaincu que nous allions tôt où tard être confrontés à un monde qui va marquer sa préférence pour la qualité de la formation et la compétitivité des acteurs formés, le visionnaire infatigable a pris le parti de créer notre école de toutes pièces. Une école ivoirienne sélective, moderne, dotée des ressorts pédagogiques et intellectuels à se réinventer quelle que soit la nature des nouveaux défis. A cette époque, le père de la nation avait fait des enseignants de tous les niveaux et degrés, la prunelle de ses yeux.
En plus de bénéficier d’une formation qui se distinguait par son souci d’excellence, les maîtres et les professeurs étaient les mieux lotis. Au propre comme au figuré. Pour inoculer dans leurs gènes les vertus incorruptibles de l’excellence, il satisfaisait au moindre de leurs caprices revendicatives. De fil en aiguille, Houphouët a fait naitre chez nombre de nos compatriotes, la vocation aux métiers de l’enseignement, de la formation. C’est ce trésor d’héritage, depuis sa charpente métallique, qui se trouve ainsi détricoté et mis en lambeaux par ce classement (avant l’heure) de la Francophonie.
Ce lamentable classement m’amène à poser cette question : C’est quoi un ministre de la République qui n’a pas la mémoire chronologique et symbolique des actions qui ont été posées avant lui dans un domaine exigeant comme celui de l’éducation ? Est-ce que ceux et celles qui s’occupent de l’éducation dans notre pays connaissent les enjeux de ce secteur qui se trouve être le socle dur de notre société ? La question que pose ce classement est la suivante : Que valent encore les ministres à la tête des départements ministériels ? Est-ce qu’ils savent, pour la plupart, de quoi retourne la spécificité de leurs responsabilités ? Se sentent-ils engagés et solidaires des actions que ceux-ci et leurs collaborateurs posent au nom du pays ? Est-ce que le Ministre sait pourquoi le pays d’Afrique francophone qui est arrivé premier, a occupé ce rang dont les encens embaument au plus profond du pays l’orgueil des citoyens ?
On ne comprend pas comment en l’espace de seulement dix années, les occupants de cet important ministère on réussit le pari de décoiffer notre jeune école de son toit en livrant les élèves aux menaçantes intempéries de l’inculture scolaire. Autrefois cité en exemple sur le continent, comme une âme en peine, notre système éducatif émasculé et décati, erre dans la cour de récréation ne sachant à qui se lier. C’est-à-croire que les acteurs de notre système éducatif n’ont pas, dans leur cartable, un manuel de modèle scolaire duquel ils peuvent s’inspirer et se projeter !? Comment on peut faire admirer les vertus d’un système éducatif lorsqu’on ne dispose pas soi-même de projet capable de porter cette ambition ?
L’école aujourd’hui, n’est pas assise au fond de la classe par hasard ! Elle a démontré, dans toutes les matières au programme, qu’elle n’avait pas le niveau pour se comparer aux autres ! Le paradoxe malheureux dans cette affaire, est que les pays qui nous dament le pion aujourd’hui, sous Houphouët, ces administrations ne disposaient que d’un parc scolaire disparate. C’est grâce à la politique éducative qui générait désormais un nombre incalculable de cadres habilités aux métiers de l’enseignement et à l’assistance que notre pays leur offrait, que l’école a décollé progressivement dans certains de ces pays. Si donc Dame Kandia n’a pas pu relever le défi de relever le niveau de notre système éducatif dans des proportions hors du commun, avec en prime, le fait d’être cité en exemple partout, quelle sera, à la place de la sanction, la récompense qui lui sera décernée ? A moins qu’on s’accorde tous à dire de façon unanime et sans complaisance, qu’elle a été, pendant dix ans, une mauvaise gardienne de notre autrefois prestigieux système éducatif qui avait pris le malin plaisir de rayonner sur la place africaine.
On sait qu’elle ne peut pas prétendre égaler le Grand Houphouët dans sa conquête de l’école ivoirienne, mais elle pouvait descendre de deux, trois niveaux pour essayer d’approcher les grands ministres de l’Education nationale que notre République a engendrés ! Le gros problème avec le pouvoir actuel, c’est que celui-ci ne procède pas, de façon régulière et rigoureuse, à des évaluations extérieures des titulaires de postes. De sorte que nous sommes toujours surpris par l’ampleur des dégâts et de leur répercussion sur la société entière.
Or, ici notamment, il est question de l’avenir du pays. C’est-à-dire de la jeunesse. Ce que nous comptons de plus important. La Crème des crèmes. Car c’est elle qui sera le moteur du développement de demain. Mais grâce à l’entregent persistant de Kandia, nous sommes classés premiers de justesse devant le dernier de la Classe. Et si la différence de point n’était qu’une question de décimale entre nous et celui qui ferme la marche de la classe ? Peut-être même que nous sommes derniers exæquo, on a juste été départagés par le critère du classement par ordre alphabétique ?!
Ici en Côte d’Ivoire, la seule mesure qui permet d’évaluer le travail d’un dirigeant à la tête du pays, c’est ce que la personne fait de notre système éducatif. Si le système éducatif est brocardé pour insuffisance de résultats, il va sans dire que cette lacune rejaillit sur toutes les prétendues belles œuvres qu’on peut voir ici et là ! En d’autres termes, la référence suprême, c’est l’état de l’école et ses principaux animateurs ! Or, comme on vient de le voir abondamment sur la base du devoir dont les résultats ont été rendus publics par la Francophonie, Kandia a échoué lamentablement à sa session d’évaluation. Il devient urgent de savoir s’il faut l’exclure maintenant de la classe ou s’il faut attendre le prochain réaménagement de l’effectif de la « classe ».Toute chose qui pourrait donner l’impression qu’on se moque des Ivoiriens et que l’école, en réalité, n’est la sainte priorité pour personne.
Dieu sauve, consacre notre école et nos enfants !
Par KONE KOBALI Libre auteur, créateur
In le nouveau réveil / Jeudi 04 février 2021 – N°5679 // www.lereveil.net
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