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Dette souveraine de la Côte d’Ivoire: Le banquier-sénateur JB Pany propose des solutions

JB Pany 1

Face à la dette souveraine préoccupante, le pétrole et la remise de dettes chinoises donnent la possibilité à la Côte d’Ivoire de cesser de creuser des trous pour fermer des trous.

Une solution avec plusieurs combinaisons semble s’imposer à la Côte d’Ivoire en effet. Le pays ne peut pas éviter de s’interroger sur les voies de sortie de la crise inévitable de la dette. Loin d’être une panacée, celle ci-après en 3 grandes étapes en est une.

I – La Côte d’Ivoire n’a plus le choix. D’abord il faut arrêter nécessairement l’hémorragie induite par la croissance exponentielle du stock de la dette depuis 2012 et renforcer l’ordre ainsi que la rigueur dans la gestion des deniers publics. Cela paraîtrait en effet incohérent de demander un abandon de dettes à la Chine (dixit Jeune Afrique) alors que le pays est soupçonné de gaspiller certaines ressources obtenues ou disponibles. Les résultats des audits passés révèlent cette vérité gênante.

Cette phase préalable d’assainissement suppose plusieurs activités telles que :

1- réduire le train de vie de l’Etat pour l’adapter aux ressources propres domestiques (hors dettes et exceptionnelles) effectivement encaissées ;

2- renforcer la rigueur budgétaire concernant le choix et le contrôle de la dépense publique de sorte à éviter systématiquement les risques de dépenses de prestige, et les risques de mauvaise facturation de la dépense publique ou de malfaçons de certains travaux commandés. De l’eau dans les robinets de la ville portuaire de San Pedro devrait être une priorité supérieure comparée à la Tour F ou à l’extension du Palais présidentiel;

3 – désendetter le pays pour ramener le stock de la dette à un niveau en cohérence, non plus avec le PIB, mais avec la pression fiscale. Car en réalité le PIB est un indicateur difficilement palpable par le Trésor public, au contraire de la pression fiscale. C’est à partir de cette dernière que les arbitrages pour le remboursement de la dette sont déclenchés. Pour ce faire les revenus du pétrole attendus dès 2023 peuvent être une solution, pareillement l’annulation de la dette chinoise annoncée. Pourvue qu’il s’agisse d’une véritable annulation de dettes et non d’une compensation avec d’autres ressources internes recherchées par la Chine. La Côte d’Ivoire doit être nécessairement vigilante afin d’éviter de brader ses bijoux de famille à la Chine dans cette démarche « d’abandon de dettes ».

4 – La maîtrise de la pression démographique est un point aussi essentiel pour maîtriser les dépenses budgétaires de l’Etat. S’il paraît inévitable d’encourager une croissance démographique saine, en revanche celle-ci doit être en cohérence avec les revenus de l’Etat. Cela passerait par la formation et la sensibilisation des citoyens. Cela pourrait aussi se traduire par une politique d’immigration responsable et transparente qui éviterait que certains pays dits amis, bien que utiles, n’hésitent pas à transférer systématiquement en Côte d’Ivoire le poids budgétaire et social de leur propre pression démographique, obligeant la Côte d’Ivoire à sacrifier ses forêts classées, à lutter contre le désordre urbain ou à accroître ses dépenses budgétaires au risque de recourir à l’endettement public pour ce faire.

II – Après avoir stoppé l’hémorragie, la Côte d’Ivoire devrait travailler à renforcer la résilience économique du pays, en d’autres termes renforcer les défenses « immunitaires » de notre économie.

Pour ce faire, plusieurs actions s’avèrent aussi nécessaires dont :

1 – l’amélioration de la pression fiscale, encore trop faible, pour la porter au moins à hauteur de la norme communautaire de 20 % du PIB; comment :

⁃ en annulant par exemple les cadeaux fiscaux non pertinents accordés aux multinationales (BIC, divers avantages, etc.);

⁃ en renforçant d’avantage le tissu formel de son économie trop fortement tributaire du secteur informel, qui, bien que jugé significativement contributif à la formation du PIB, apporterait encore une faible contribution à la caisse commune du Trésor public ;

⁃ en luttant efficacement contre l’incivisme fiscal qui semble la règle générale dans certaines communautés de contribuables ou dans certains secteurs d’activité ;

⁃ etc.

2 – le renforcement nécessaire du capital humain par un investissement intelligent et suffisant dans les secteurs comme la formation, la santé, la production domestique des biens de première nécessité comme la nourriture et les médicaments, etc. Le capital humain est le socle de la résilience économique.

3 – l’amélioration et le renforcement incontournable de l’outil de production domestique : sans une production domestique suffisante et profonde sur la chaîne de valeur, l’économie va continuer à exporter la valeur ajoutée et les emplois nobles. Cette situation inadmissible pour un pays comme la Côte d’Ivoire qui a tout pour y arriver, la contraindrait à continuer de recourir à l’endettement public pour satisfaire certains besoins, faute de ressources financières suffisantes. Une politique suffisante de promotion de la valeur ajoutée domestique et de valorisation du pouvoir d’achat du citoyen semble s’imposer.

Par exemple la maîtrise de la ressource en eau pour l’agriculture partout sur le territoire et les aménagements des terres agricoles sont une opportunité pour améliorer la résilience agricole du pays qui est, quoiqu’on en dise, un pays agricole. Sans cela le pays demeurera dépendant de l’extérieur pour nourrir sa population. La crise sanitaire à Covid-19 et la guerre en Ukraine sont suffisamment édifiants pour parler des limites de nos choix courants en la matière. Le rang de second pays importateur africains ou cinquième importateur mondial de riz n’est pas glorieux !

C’est aussi une opportunité pour sortir le secteur agricole de la précarité de l’informel et de le protéger contre les nombreux risques de réputation auxquels il demeure exposé. N’oublions pas que plus de la moitié des citoyens ivoiriens dépend ou est directement touchée par les revenus agricoles. L’agriculture se positionne aussi comme une mine fiscale maladroitement et encore insuffisamment exploitée.

La production et la transformation domestique des biens essentiels limiteraient en effet le gaspillage des devises et maintiendraient localement la valeur ajoutée ainsi que les emplois nobles.

III – Après avoir stoppé l’hémorragie et travailler à renforcer la résilience économique du pays, la troisième étape serait de donner un coup de fouet à la croissance, en d’autres termes, « envitaminer » l’économie, ou arroser la croissance là où cela est nécessaire. La Côte d’Ivoire doit sur ce chapitre travailler à réduire le risque pays, la sécurité des biens et des personnes et améliorer le sentiment d’équité sociale. Cela aurait l’avantage de faire baisser les taux d’intérêts emprunteurs des crédits trop souvent majorés d’une prime de risque trop élevée lorsqu’il s’agit de la Côte d’Ivoire.

Pour ce faire, des décisions fortes et responsables sont à prendre en vue de rassurer les acteurs économiques et les investisseurs de tous horizons, mettant de côté nos égos et toutes considérations clivantes :

1 – renforcer le respect scrupuleux des libertés individuelles et collectives. Mettre la Justice et les institutions de contrôle de l’action gouvernementale hors de portée de toutes collusions et collisions avec le pouvoir Exécutif ou avec des initiatives qui encourageraient des sanctions politiques ou arbitraires ou encore inappropriées.

2 – Éteindre tous les risques de tensions sociales potentielles. Faire libérer les prisonniers des crises politiques passées pourrait y contribuer afin d’apaiser le front social.

3 – Réconcilier réellement la Justice avec le citoyen. Il est incompréhensible de constater que malgré le principe de la séparation des pouvoirs, consacré par la Constitution ivoirienne, le Haut Conseil de la Magistrature soit « encombré » par la présence du Ministre de la justice, siégeant le matin en Conseil de Ministres et l’après-midi au Haut Conseil de la Magistrature. Quelle utilité ?

4 – Construire une Nation en tenant compte de la diversité sociologique et culturelle est un impératif à libérer de toute volonté annexionniste. Le signal à donner à ce niveau pourrait être perçu dans la sphère économique comme un indicateur de stabilité à long terme.

Le point de vue ci-dessus relatif à la solution de lutte contre l’asphyxie de la dette n’est évidemment pas exhaustif et ne peut être présenté comme une panacée pour régler toutes les difficultés économiques et financières de la Côte d’Ivoire. L’inflation, la Monnaie, etc., sont des éléments non abordés.

Cependant la présente contribution voudrait inviter l’ensemble des analystes ou observateurs de la vie économique de la Côte d’Ivoire à une réflexion plus étanche et complète sur le piège dans lequel la Côte d’Ivoire s’enfonce un peu plus chaque année avec une dette à croissance exponentielle 📈 et sans issue.

Sénateur Jean-Baptiste PANY

Élu de la République de Côte d’Ivoire


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