Longue détention préventive de son client : Maître Coulibaly N’golo dénonce des défaillances du système judiciaire ivoirien
Poursuivi pour meurtre, Dah Mathias a été condamné à 12 ans de prison, mardi 16 mai 2023, par le tribunal criminel de Yopougon.
De ce qui ressort de la grande salle d’audience du palais de justice, l’inculpé aurait d’un coup de machette porté à la gorge ôté la vie de la victime Kamenan Assamarakou Etienne.
C’était au cours d’une violente bagarre les opposant tous deux, dans la nuit du 10 août 2011, à Oress Krobou, un village d’Agboville.
A la suite des débats et des plaidoiries, le tribunal a requalifié les faits de poursuite en ceux de coups mortels avant de prononcer la sentence indiquée plus haut (12 ans de prison) alors que le procureur avait demandé 20 ans de prison dans ses réquisitions.
Dah Mathias finira de purger sa peine le 24 octobre prochain puisqu’ayant déjà passé plus de 11 ans en détention préventive sans être jugé.
Pour maître Coulibaly Ngolo Daouda qui co-défendait l’inculpé avec sa collègue, Roselyne Aka-Serikpa (avocate qui avait assuré la défense du seigneur de guerre Amadé Ouérémi), les droits de leur client ont été bafouillés.
Se prononçant devant quelques organes de presse en fin de procès, il a dénoncé une « longue et injustifiée détention de Dah Mathias ».
L’avocat a laissé entendre que, « cela démontre que le système judiciaire ivoirien comporte d’évidentes défaillances ».
Pour se montrer plus explicite, maître Coulibaly Ngolo a relevé plusieurs observations.
Il a expliqué qu’au lieu de bénéficier de la présomption d’innocence, le mis en cause a plutôt subi un traitement dicté par les mauvaises théories de présomption de culpabilité.
A l’en croire, Dah a passé 3 mois, c’est-à-dire du 11 août 2011 au 23 octobre 2011, en garde à vue à la Gendarmerie de Tiassalé. Ensuite, il a été placé sous mandat de dépôt le 24 octobre 2011et n’a été jugé que le 16 mai 2023, soit plus de 11 ans et 7 mois. Ce qui fait de lui l’un des plus vieux détenu sans jugement.
« Avec l’avènement de la loi 2018-975 du 27 décembre 2018, la détention préventive en matière criminelle est encadrée et ne peut excéder 24 mois selon l’article 167 CPP. Dah Mathias était donc en détention injustifiée au regard des articles 167 et 175 CPP. Il devrait donc bénéficier de la liberté d’office tel que le prescrivent les articles 181 et 182 CPP », a soutenu maître Coulibaly en prenant le soin de préciser que leur client n’avait pas d’avocat pour l’assister à la gendarmerie et devant le juge d’instruction.
Et d’ajouter que « depuis la réforme du code de procédure pénale de 2018, un accusé ne peut être détenu plus de 24 mois. Or, dans le cadre d’espèce, l’instruction a duré pendant plus de 4 ans.
La chambre d’accusation (devenue chambre d’instruction) à mis 4 ans pour rendre son arrêt de renvoi, alors que la loi lui impose un délai de 6 mois.
En outre, l’accusé devrait comparaître dans un délai de 6 mois, pour être jugé, mais curieusement, il a fallu attendre 5 ans ( le 16 mai 2023).
Compte tenu de ces irrégularités flagrantes, les droits de la défense ont été violés et le Procureur Général devrait mettre Dah Mathias en liberté d’office.
Si le juge d’instruction avait été diligent, si la chambre d’accusation avait correctement fait son travail, si les inspecteurs avaient accompli leurs missions de contrôle, ce détenu et plusieurs autres ne passeraient pas plus de 10 ans avant d’être jugés.
Il y a-t-il de l’espoir que ça change ? Puisque le garde des Sceaux a récemment interpellé ses collègues sur le fait que lesdits collègues Magistrats avaient plus de « 600 dossiers non traités dans les tiroirs ». Ce qui n’est pas facile pour les magistrats.
Vagoné Dry-Bi
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